‘Les frontières de l’ordre carcéral’. Affectation, négociation des identités et surveillance en maison d’arrêt.

Soutenance de la thèse de science politique de Manon Veaudor à l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines.

J’ai assisté le 8 septembre dernier à la soutenance de thèse de Manon Veaudor sur « Les frontières de l’ordre carcéral ». Qu’elle ait choisi ce thème n’est pas un fait du hasard. Étudiante, elle était engagée au Genepi et participait à la commission prison de la CIMADE.

Carte des établissements pénitentiaires français

Son propos est de saisir le fonctionnement d’une institution pénale sous l’angle des affectations : selon quels critères l’administration d’une prison décide-t-elle d’affecter tel détenu dans tel bâtiment ou telle cellule ? Pour cela, elle a mené des entretiens avec des surveillants et des détenus dans deux maisons d’arrêt, une grande en région parisienne et une petite dans le sud-est de la France.

Moi-même, j’ai pu constater, comme lors des CPU auxquelles j’ai participé, que le personnel d’encadrement connaît bien les détenus. Il recherche la meilleure affectation possible en cellule afin de favoriser le vivre ensemble dans ces conditions particulières que sont l’incarcération. Dans sa thèse, Manon Veaudor analyse le travail de ce personnel avec les outils de la sociologie. Appréhender la logique d’étiquetage et ses bénéfices.

Le passage au quartier arrivant sert à faire connaissance afin d’humaniser la peine. C’est le moment de la métamorphose du détenu en prisonnier.

L’attribution de la cellule est un instrument de régulation. Elle peut être une récompense comme une punition.

Quelques éléments à prendre en compte :

  • Faut il prendre en compte les liens avec les quartiers d’origine des personnes incarcérées, leur âge et leur délit, sous peine de reproduire le monde extérieur ? Ou au contraire tout faire pour couper le détenu de ses « habitudes » afin d’éviter les clans, ce qui le fragilisera par manque de repères ?
  • Deux catégories de personnes se côtoient dans les prisons : la population habituelle (récidivistes) et la population des primo-arrivants, étrangère, jeune, vulnérable.
  • La localisation de l’établissement, son histoire, son architecture sont des éléments qui induisent une politique intérieure.

On favorisera plutôt les regroupements de personnes selon leur « origine » dans la limite de la bonne gestion des coursives et la prévention des risques. C’est la sociologie de la régulation de l’ordre.

Entre détenus et surveillants, il y a toujours négociation. On voit donc bien la difficulté d’une politique nationale puisque les établissements, les détenus, les surveillants et les délits sont différents.

La gouvernance est toujours un bricolage pour le vivre ensemble.

Il ne faut pas non plus négliger la vie personnelle des surveillants qui influe sur les réponses apportées. C’est « Faire vivre pour survivre ».

L’introduction par Manon Veaudor de sa thèse devant le jury de doctorat peut être consultée ici.

Marie-Laure Burnichon

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